COMMISSARIAT / CURATING >> Cartes blanches & mémos pour le futur / Cartes blanches & memos for the future @ Sporobole (Sherbrooke) – 7 mars au 12 avril 2025

Cartes blanches & mémos pour le futur @ Sporobole [Chantier IA 2]

Marie-Ève Levasseur & Sabrina Ratté

Dans le cadre de son Chantier IA 2025, Sporobole présente Cartes blanches & mémos pour le futur, une exposition qui réunit deux propositions artistiques issues des résidences 2024, soit celles de Marie-Ève Levasseur et de Sabrina Ratté.

Prenant appui sur la figure de la carte (divinatoire et à collectionner) et s’arrimant toutes deux à l’idée d’anticipation et de projection future, ces œuvres abordent notre relation à l’avenir et nous amènent à repenser notre impact au sein d’environnements en mutation.
La figure de la carte se présente sous différentes facettes : cartes à jouer, à collectionner, divinatoires, identitaires, graphiques, etc. La carte, par définition, circonscrit un ensemble d’éléments, donne des indications et contient/transmet des informations, des données, des messages, des symboles. En contrepartie, la carte blanche délimite un espace de liberté où tout peut encore s’inscrire : elle véhicule une vision possible, porte une part d’imprévu qu’illumine un principe de potentialité. Ce qu’on ne peut prévoir repose sur un état de pénombre : on distingue difficilement ce qui se profile à l’horizon même si les données sont là, prêtes à intégrer l’algorithme qui voudrait bien nous calculer un monde hypothétique. À l’image du fou ou du joker, on ne connaît pas l’avenir qui éventuellement et inévitablement s’inscrira sur cette carte et dont le mémo nous parviendra assurément, mais sans nécessairement prévenir.

Toutes deux issues des programmes de résidences de notre Chantier IA 2024, les propositions artistiques présentées dans le cadre de cette exposition s’inscrivent dans le sillage d’explorations avec l’intelligence artificielle (IA). Prenant appui sur la figure de la carte – à collectionner dans le cas de Marie-Ève Levasseur et divinatoire du côté de Sabrina Ratté – et s’arrimant à l’idée d’anticipation et de projection future, les œuvres proposées abordent notre relation à l’avenir et nous amènent à repenser notre impact au sein d’environnements en mutation. Véritables objets de médiation, ces cartes deviennent ici un prétexte pour réfléchir un futur dont la part d’imprévisibilité peut inquiéter. Sans pour autant prédire, il s’agit – avec cette exposition – d’envisager l’avenir en ouvrant des espaces de dialogue et d’échange que la force de calcul de l’IA peut parfois stimuler.    

L’installation écosystèmes d’altérité radicale (relations génératives) (2024-2025) de Marie-Ève Levasseur rassemble une série d’éléments autour de l’idée d’interaction et d’interrelation entre entités vivantes et non vivantes, et le lien qu’elles entretiennent avec leur environnement. S’inspirant de l’univers des insectes, les figures créées à l’aide d’IA se présentent comme des cyborgs dont l’hybridité technologique se cristallise à travers des comportements et des aptitudes qui sont,  a priori, inexistantes dans la nature. Cet écosystème fictif, qui met de l’avant l’aspect relationnel et la question de l’interdépendance, est constitué de spécimens types dont les identités très spécifiques se trouvent transposées sous forme de cartes à collectionner. 

Les cartes jouent ici un rôle identitaire : subdivisées en familles identifiées sous différentes relations symbiotiques – parasitisme, mutualisme et commensalisme –, puis formatées afin d’évoquer une relation d’appartenance plus globale, elles mettent en scène un petit théâtre interrelationnel qui s’actualise à travers la composante vidéographique de l’installation. Connectée à un système d’IA, cette vidéo générative simule sous nos yeux un enchaînement cyclique de (co)existences virtuelles qui évoluent dans un environnement obéissant à une logique métamorphique. Si les cartes figurent ici les personnages principaux d’un contre récit spéculatif, le futur qui s’en dégage s’inscrit quant à lui dans les marges aménagées par le travail algorithmique. 

De son côté, l’installation Cyberdelia (2024) de Sabrina Ratté explore le motif de la carte divinatoire. Librement inspirées des arcanes majeures du tarot, 22 cartes « contiennent » autant de courtes séquences vidéos créées à l’aide d’un système d’IA. Sorte d’oracle cyberdélique – en référence à la rencontre entre la cyberculture et la sous-culture psychédélique des années 1980-1990 – l’œuvre invite le public à tirer une carte, laquelle devient alors un outil de co-réflexion en regard des questionnements de la  personne qui « consulte  », pour reprendre un terme du langage divinatoire. Cette même carte est ensuite lue via un lecteur RFID afin de révéler la séquence vidéo associée, déployant sous nos yeux la perspective algorithmique de l’IA.

L’œuvre pose un regard sur notre monde et ses mutations multiples, évoquant par le fait même les transformations environnementales, tout en prenant appui sur des éléments paradigmatiques qui fondent nos représentations du monde. Des figures fortes – archétypes, thèmes ou phénomènes – tels que l’obsolescence, l’utopie, la symbiose, la luminescence, l’abysse, le vortex, etc. sont ainsi mises de l’avant. Se déployant en liaisons et déliaisons d’idées, les vidéos que déclenchent les cartes sont comme des micro capsules dévoilant des visions oniriques qui nous projettent vers un avenir éventuel. Les « mémos pour le futur » que nous transmettent ces cartes agissent alors comme autant de glitches fulgurants, lézardant le présent.

Cartes blanches & memos for the future @ Sporobole [Chantier IA 2]

Marie-Ève Levasseur & Sabrina Ratté

As part of its Chantier IA program, Sporobole presents this exhibition bringing together two artistic proposals from the 2024 residencies, by Marie-Ève Levasseur and Sabrina Ratté. Based on the figure of the card (divinatory and collectible), and both linked to the idea of anticipation and future projection, these works address our relationship with the future and lead us to rethink our impact within changing environments.

The figure on the card has several facets: playing cards, collectibles, divinatory, identity, graphic, etc. By definition, a card circumscribes a set of elements, gives indications and contains/transmits information, data, messages and symbols. On the other hand, the carte blanche delimits a space of freedom where anything can still be inscribe: it conveys a possible vision, carrying an element of the unforeseen, illuminated by a principle of potentiality. What we can’t predict is based on a state of penumbra: it’s hard to see what’s on the horizon, even if the data is there, ready to be integrated into the algorithm that would like to calculate a hypothetical world. Like the fool or the joker, we don’t know the future that will eventually and inevitably be inscribed on this card, and whose memo will certainly reach us, but without necessarily warning.

Both stemming from our Chantier IA 2024 residency programs, the artistic proposals presented in this exhibition follow in the wake of explorations with artificial intelligence (AI). Drawing on the figure of the card – collectible in the case of Marie-Ève Levasseur, and divinatory on Sabrina Ratté’s side – and anchored in the idea of anticipation and projection forward, the proposed works address our relationship with the future, and prompt us to rethink our impact within changing environments. True objects of mediation, these cards become a pretext for reflecting on a future whose unpredictability can be worrying. Without being predictive, the aim of this exhibition is to envisage the future by opening up spaces for dialogue and exchange, which the calculating power of AI can sometimes stimulate.

Marie-Ève Levasseur’s installation ecosystems of radical otherness (generative relationships) (2024-2025) brings together a series of elements revolving around the idea of interaction and interrelation between living and non-living entities and the link they maintain with their environment. Inspired by the world of insects, the AI-powered figures are cyborgs whose technological hybridity crystallizes in behaviors and abilities that are, a priori, non-existent in nature. This fictitious ecosystem, which emphasizes the relational aspect and the question of interdependence, is made up of typical specimens whose very specific identities are transposed in the form of collectible cards. 

Here, the cards play a role of identity: subdivided into families identified under different symbiotic relationships – parasitism, mutualism and commensalism – and then formatted to evoke a more global relationship of belonging, they stage a small interrelational theater that is actualized through the installation’s videographic component. Connected to an AI system, this generative video simulates before our eyes a cyclical sequence of virtual (co)existences evolving in an environment obeying a metamorphic logic. If these cards are the main characters in a speculative counter-narrative, the future that emerges from them is inscribed in the margins created by algorithmic work.

Cyberdelia (2024) by Sabrina Ratté explores, on its side, the motif of the divinatory card. Freely inspired by the major arcana of the tarot, 22 cards “contain” as many short video sequences created with the help of an AI system. A sort of cyberdelic oracle – in reference to the encounter between cyberculture and the psychedelic subculture of the 1980s-1990s – the work invites visitors to draw a card, which then becomes a tool for co-reflection in relation to the questioning of the “consultant”, to borrow a term from the language of divination. This same card is then read via an RFID reader to reveal the associated video sequence, unfolding before our eyes the algorithmic perspective of AI.

The work takes a look at our world and its multiple mutations, evoking environmental transformations while drawing on paradigmatic elements that underpin our representations of the world. Strong figures – archetypes, themes or phenomena – such as obsolescence, utopia, symbiosis, luminescence, the abyss, the vortex, etc. are thus put forward. Unfolding by linking and untying ideas, the videos triggered by the cards are like micro-capsules revealing dreamlike visions that project us into a possible future. The “memos for the future” conveyed by these cards act as dazzling glitches, cracking the present.

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